Bonjour !

Je suis écrivain et scénariste de BD.
Mon premier livre est sorti en 2009. Depuis, j'en ai sorti 22 autres... Je travaille aussi pour le ciné, la télé, le jeu vidéo, les applications et même le jeu de plateau.
Car pour toutes ces créations, il y a besoin d'écrire. Donc j'écris. Depuis le temps que j'en rêvais !

Et pourtant bien souvent je l'entends, cette question étrange : "Et sinon, vous avez un vrai métier ?".
Elle me fait un drôle d'effet et je n'ai pas encore trouvé comment y répondre... Alors ce blog va servir à ça : à essayer d'expliquer que oui, écrivain et scénariste, c'est un métier, un vrai.

jeudi 19 juin 2014

Invisible ?

Je suis invisible.
Si ça peut être bien pratique dans certains métiers, la cambriole ou l'espionnage par exemple, c'est pas terrible quand on est auteur de BD ou de livres jeunesse.

Invisibilité = peu de ventes = peu de droits = bien du mal à payer les factures de fin de mois...

Des livres invisibles

Mes livres sont invisibles. Ce qui nous renvoie aussitôt à la mathématique exposée ci-dessus...
Il est bien rare de les trouver sur les tables et dans les étagères des libraires ! Peut-on leur reprocher ? Il y a tant de livres qui sortent chaque jour ! Ça leur interdit de donner à mes bouquins les deux choses dont ils auraient besoin : de la visibilité et du temps...

Pas de place en magasin. Les libraires ne commandent que l'exemplaire qui a été demandé par un client et, pire que tout, je rencontre souvent des lecteurs, en festivals, qui me disent : "J'ai voulu commander ce livre chez mon libraire. Il m'a répondu qu'il était épuisé (ou indisponible, ou qu'il n'existait pas).
Ils sont pourtant disponibles, ces livres. Ils s'affichent sur Electre et sur Dilicom. Ils ne sont pas plus compliqués à commander que n'importe quel autre bouquin... 

Alors peut-être bien qu'ils sont vraiment invisibles pour beaucoup de libraires...

Comment se faire connaitre ?

Pour les faire exister un peu plus, il y a les articles et les critiques dans les journaux, les revues, sur le net. Mais les services presse servent souvent uniquement à alimenter les bibliothèques des journalistes. Pas facile d'avoir une petite critique publiée !
Et bizarrement, même des papiers dithyrambiques dans Actua BD, DBD, l'Avis des bulles et une dizaine d'autres sur des blogs plutôt bien fréquentés ne déclenchent que bien peu de ventes !

Ça confirme... Pour les lecteurs de journaux et de magazines aussi, mes livres sont invisibles...

Et les festivals ?

Reste les festivals. Là, on peut rencontrer son public. Mais en tant que petit auteur, c'est bien difficile de se faire inviter !
Et quand je suis derrière ma table de dédicace, je passe encore souvent inaperçu, encore invisible et impuissant face aux queues générés par les "visibles"...
Combien de journées passées en festival pour signer moins de 10 albums ? Je ne les compte plus !

Même en festival, pour beaucoup, mes livres restent invisibles.

"Et que faudrait-il faire ?
Chercher un protecteur puissant..."

Je me la pose souvent, comme Cyrano, cette question.
Cette invisibilité disparaitrait-elle si j'éditais chez de grands éditeurs ? Peut-être. Peut-être pas.

Mais arrivent alors d'autres questions, en foule :
Un grand éditeur voudrait-il de moi ?
Mon travail est-il vraiment bon ?
Mérite-t-il d'intéresser plus de lecteurs qu'il ne le fait actuellement ?
Si je suis invisible n'est-ce pas parce que je suis nul ?
Est-ce que je ne devrais pas arrêter d'écrire ?
Peut-être. Peut-être pas...

Elle est terrible, cette remise en cause quand elle me tombe dessus.
Parce qu'il n'y a rien de pire que le doute. D'un seul coup, je ne suis plus bon à rien. Incapable de créer quoi que ce soit.
Quand ça m'arrive, j'ai envie de devenir tout petit, d'être invisible. C'est grâce à cette envie que je parviens chaque fois à remonter la pente : invisible, je le suis déjà.

Pourquoi j'écris ?

Et j'ai bien envie de le rester.
Ça me va bien. Je fais ce que j'aime, chez des petits éditeurs, en toute indépendance artistique, en toute liberté. Je vends ce que je vends. Et même si c'est peu (trop peu, en particulier, pour les factures dont je parlais au début), les retours souvent enthousiastes de mes lecteurs touchent juste à chaque fois. Ils me vont droit au cœur...

Faire réfléchir, émouvoir, faire rire, faire pleurer, même une seule personne, c'est quelque chose de formidable !
Et il me semble bien que c'est pour ça que j'écris.