Depuis des années, une part non négligeable de mes revenus et de celui d'un bon nombre d'auteurs et d'artistes est assuré par des interventions en milieu scolaire.
Les interventions en milieu scolaire
Personnellement, j'adore ça.
Les plus jeunes me trouvent très grand et très vieux. Les plus grands veulent savoir si je suis très célèbre et si je gagne plein d'argent... Et bien sûr, au delà de ça, tous écrivent, avec mon aide, des textes, des bd, des poésies.
Je leur apprends, modestement, dans les limites de mes compétences, à libérer leur imagination, à écrire sans contrainte. Et le résultat est toujours formidable.
BD écrite et dessinée par des élèves du lycée Claire Champagne de Segonzac |
Je leur parle de poésie avec "Bestiaire", surréalisme avec "Anatole", droits de l'enfant avec "L'enfant sur la digue".
J'accroche dans leurs écoles des expositions.
Je leur raconte le métier d'écrivain et de scénariste, je leur explique la condition de l'artiste.
C'est un vrai travail qui demande beaucoup d'investissement et d'énergie.
Une intervention, ça coûte. Alors :
Bien sûr, une intervention, ça coûte. Et ça n'est pas donné pour des établissements au budget parfois serré. Mais je suis auteur professionnel et je dois bien essayer de vivre de ce métier. Je facture donc. Et, comme je disais au début de l'article, cela représente une part non négligeable de mon revenu annuel.
Intervention sur les droits de l'enfant au collège de Saint Varent. |
Généralisons le bénévolat !
Mais voilà, c'est bientôt fini tout ça.
Parce que voilà qu'arrive la "RÉSERVE CITOYENNE" !
Désormais, les enseignants pourront puiser dans le listing de la réserve citoyenne pour faire appel à des intervenants bénévoles.
Belle invention et, après tout, pourquoi pas ? Je n'ai rien contre le bénévolat. J'en fais moi même pas mal au sein d'une maison d'édition associative. Ces "réservistes" auront sans doute l'envie et les compétences pour réaliser ces interventions.
Mais que deviendront les gens qui, comme moi, tiraient une part de leurs revenus en effectuant des interventions payantes ?
Que pèseront ces professionnels face à la promesse de la gratuité ?
Pas grand chose, je le crains !
A l'heure où nos revenus se réduisent comme peau de chagrin, où nos charges sociales augmentent de façon drastique, où il devient de plus en plus difficile de vivre de son métier, cette généralisation du bénévolat dans les établissements scolaires n'est vraiment pas une bonne nouvelle.
La fin des interventions d'auteurs ?
J'ai bien peur qu'il soit désormais difficile de décrocher des interventions payantes !
Et que cette réserve citoyenne nous fasse perdre, au delà d'un peu d'argent, toutes ces formidables occasions de rencontrer notre public pour des heures de partage et de création.
Alors bien sûr, s'il devient trop compliqué de facturer des interventions, il sera toujours possible d'en effectuer quelques unes bénévolement. Mais cela ne durera qu'un temps.
Car à force de gagner toujours moins, un jour viendra où il n'y aura plus d'auteurs et d'artistes professionnels.
Ce sera un bien triste jour. Il me semble qu'il approche. Inéluctablement...